Ou comment quand on n’a rien à dire, rien de spécial à vendre, comment tenter malgré tout de se donner une contenance à tout prix. Puisque l’antiracisme-spectacle dit que son couple présage de quelque chose ou a une « particularité », voilà donc des gens qui viennent le confirmer.
L’homme veut absolument faire croire qu’il est « color blind », qu’il ne perçoit pas la couleur de sa femme et qu’il a même appris qu’elle était noire lorsque sa famille le lui a fait remarquer.
C’est joli, non ? Ça participe de l’image du type idéal, guidé par son seul amour et non par ses envies, qui subit le hasard et non ses passions, un homme à des années-lumière de tous ceux qui fréquentent tel type de personnes en fonction de leur couleur etc. Bref le mythe antiraciste par excellence.
Sauf qu’il se trahit tout seul, comme un grand, sans même s’en rendre compte plusieurs minutes plus tard.
Je ne vois pas la couleur : 4ème minute
Je suis attirée par les Noires : 21ème minute
La réalité est que cet homme s’arrête lui aussi sur la couleur de peau à partir du moment où, comme il l’affirme ici, il a toujours été attiré par les femmes noires. Il ne peut donc absolument pas prétendre ne pas avoir remarqué la couleur de sa femme puisque c’est précisément le premier élément qu’il a perçu d’elle et qui a joué un rôle déterminant pour son approche.
Faire croire le contraire n’est qu’un stratagème afin d’essayer de coller au stéréotype du type ouvert, désintéressé et tolérant que véhicule l’antiracisme-spectacle. Image à laquelle adore s’identifier beaucoup de ce genre de « couples » se croyant autorisés à venir gentiment admonester tous ceux qui ne sont pas prétendument « color blind » comme eux.
Sa femme elle-même pourrait ne pas échapper à cette règle et avoir choisi son mari d’abord parce qu’il est blanc, du genre : « pour les affinités on verra après mais d’abord un blanc hein … ».
Ce dont on ne doute pas un instant lorsque l’on voit la discussion surréaliste sur le métissage et la beauté : ici
Selon elle, c’est « bien la preuve que le métissage c’est bien » puisque tout le monde pense que des enfants métis sont beaux, confondant sottement esthétique et différence.
Au passage, on remarquera que là où le Blanc parle sans fard de ses désirs d’une «femme noire » et d’une attirance envers cette couleur, de l’autre côté, sa femme tente d’expliquer sa présence au côté de cet homme uniquement par le biais de l’environnement dans lequel elle a grandi. A aucun moment , elle n’assume ses choix préférentiels pour reconnaitre par exemple qu’elle vit avec lui parce qu’elle l’a voulu, décidé sciemment et qu’elle a toujours rêvé depuis toute petite d’un homme blanc, blond aux yeux bleus.
Cette franchise est rarement admise du côté « noir » chez qui on cherche constamment un prétexte non-subjectif, indépendant de ses penchants qui ont été mis en sourdine, afin de justifier sa situation. Ce qui laisse une impression étrange qui veut que le Blanc sublime ses passions, les transpose constamment vers le plan de matérialisation, du passage à l’acte, donc propose pendant que dans le même temps le Noir, lui, dispose. Là où le Blanc y voit un moyen de bien être vu, d’être perçu comme quelqu’un d’ouvert, le Noir hésite à marcher dans ses pas, par peur d’être perçu comme un opportuniste.
C’est exactement ce qui ressort – ce n’est pas forcément la réalité – ici : on a l’impression que la femme noire a disposé après qu’un homme blanc ait bien voulu d’elle. C’est lui qui exprime SES choix, c’est son avis qui est mis en exergue sans que l’on ne sache rien des siens, puisqu’elle ne les exprime quasiment pas, comme si cela coulait de source et que c’était plutôt à l’exception, l’anormalité, de s’exprimer et d’essayer de faire comprendre le pourquoi d’un tel choix et de s’en féliciter puisque tout le monde est gagnant.
Un Noir n’admet que rarement qu’il est obsédé par les Blancs. Peut–être aussi parce que c’est la norme d’aimer ce qui est beau (donc blanc) et qu’aimer les Noirs, c’est un peu comme aimer les « femmes fortes », une exception ? Ce qui est sûr est que cette mentalité en dit beaucoup sur le rapport de domination que les Noirs ont dès qu’il s’agit de métissage : c’est eux qui ont le plus à gagner.